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Cristofaro Delvecchio

Papiers et partages (à tendance communiste)

Vis ma vie de chômeur à Pôle Emploi (4)

Vis ma vie de chômeur à Pôle Emploi (4)

Avant-dernier épisode des aventures d’Olivier à Pôle Emploi : le système est-il efficace ?

Par Olivier.

Mes CV en ligne chez Pôle Emploi

De retour dans mes pénates, je m’attelle une fois de plus à la remise en forme de ma vie entière pour coller aux différents formulaires nécessaires aux 100% de complétion de mes CV.

Impossible de moduler, ici : on choisit ses compétences, expériences, langages de programmation et outils informatiques connus dans des listes de choix, résumant une vie de manière particulièrement triste. De la bonne G(P)EC, pour les connaisseurs…

Nul doute que l’exploitation de mon CV ne sera qu’informatique : un bon vieux « SELECT * FROM DEMANDEURS WHERE » avec mes critères bien à moi.

Et peut-être des pousse-boutons de l’autre côté…

À moi de trouver comment parler de mon métier avec les mots des autres pour réduire au mieux toutes les ambiguïtés que je flaire à pleine truffe (oui, j’ai un chien).

Je conçois néanmoins 3 CV dans un premier temps :

  • Un technicien / réparateur / formateur en informatique PC (ma passion)
  • Un développeur en VB / COBOL / SQL (hé ! j’ai 14 ans à rattraper maintenant…)
  • Un assistant en RH efficace et loyal mais avec un passé atypique (le CV n’est même pas bidonné)

La possibilité de rendre les CV anonymes vis-à-vis du recruteur évite intelligemment les liens de cause à effet qui pourraient m’être préjudiciables à l’analyse poussée de mes 3 cibles, plutôt déconcertantes de la part d’un seul individu. Des nouvelles fonctionnalités qui me permettent aujourd’hui de laisser mon CV en ligne sur le site de Pôle-Emploi.

Je fais rapidement le tour. Très classique environnement de gestion, il s’agit d’un site qui tape à l’œil mais dont l’utilité est discutable pour de nombreuses raisons qu’instinctivement je ressens – professionnellement parlant : c’est mon métier, de produire des trucs comme ça !

Combien de fois ai-je eu à développer moi-même des applications de gestion avec une interface si jolie que l’on en oubliait la vacuité du fond (En informatique comme ailleurs, l’équation FOND + FORME = CONSTANTE se vérifie souvent, hélas) :

  • ici aussi, lors des créations de profils, les listes de choix ont été pré-remplies (et sont imposées) par des non-spécialistes (de la réalité !), cadrées sur les célèbres codes ROME, dont la dialectique est si éloignée de cette réalité (même les employeurs qui « contrôlent » la Syntec, la Convention Collective de l’informatique, ne s’expriment pas comme ça…), imposant de choisir entre conseil et commerce, assistance ou réparation, rendant les recherches de profils stricts et fermés, ce qui pourrait se comprendre pour des métiers vus comme répétitifs, et même là, je saurais aisément démontrer moi-même qu’aucun métier au monde ne peut ainsi être modélisé de façon si rigide, sauf à devenir un employé-robot chez Adidas… Je joue le jeu quand même mais je n’ai déjà plus d’illusion… rien qu’en créant la fiche client, les futurs défauts de mise en relation SQL (le langage des bases de données) sont criants…
  • Les recherches sont du même acabit, si ce n’est que les employeurs semblent bénéficier d’un outil de création d’annonces moins rigide sur certaines zones, ce qui rend du coup les mises en adéquation offre/demande encore plus hasardeuses : je me vois automatiquement proposer de la réparation de machines-outils où des diplômes que je n’ai pas sont exigés… balaises, les développeurs SQL : incompétence totale à produire des recherches intégrant inclusions et exclusions, du « classique travail d’informaticien débutant »… à moins que ce ne soit la maîtrise d’ouvrage Pôle-Emploi qui espère encore mieux modéliser le marché du travail en invitant à des carrières nouvelles… ou l’ESN qui a remporté haut-la-main l’appel d’offre de création de ce site politiquement miraculeux correct…

Bref un système expert conforme au bon vieux « SELECT * FROM DEMANDEURS WHERE… MAN IS PERFECT » auquel je fais cyniquement référence dans mon titre.

Je ne serai ainsi JAMAIS sélectionné pour « proposer des pommes à la vente » si je sais seulement « vendre des pommes sur les marchés ». Pratique, l’informatique. Il aurait peut-être fallu faire développer la « page demandeur » et la « page recruteur » par la même personne… Et imposer la même dialectique à chaque partie…

Un langage commun est toujours plus utile pour communiquer. Mais pour ça, il faut réfléchir et s’intéresser objectivement à la réalité, pas seulement vouloir montrer une vitrine…

Les offres « sans compétences exigées » ou métiers dits « alimentaires »

Un rapide coup d’œil à la liste de ces offres est suffisant pour se faire une idée :

  • 80% concernent le service aux personnes âgées : aide au lever, au repas, à la toilette, ménage, promenade… disponible de 8h à 20h, 6/7 jours…
    • Plus des trois quarts de ces offres exigent néanmoins des certificats d’aptitude et demandent une abnégation dont je ne dispose pas à moyen terme
  • 10% concernent la manutention de colis avec nettoyage de son propre poste de travail
    • La plupart exige néanmoins un Caces 1 et proposent de venir au poste à 3h du matin… on comprend le manque de candidats…
  • 10% concernent la technicité de surface…
    • Gloups…

Même pas caricatural, le rapport « temps de mise à disposition » sur « revenu horaire » est juste… ignoble. Avec les encouragements de Pôle-Emploiils doivent avoir des primes sur l’alimentaire…

1ère offre nécessitant l’arbitrage d’un conseiller (refusée)

Je n’ai pas attendu l’arbitrage de mon Conseiller pour envoyer des CV – fort heureusement – mais le principe de l’aide pour chaque offre à laquelle je vais postuler via le site « corporate » me paraît utile et constructif. Mon Conseiller aurait d’ailleurs pu m’en parler lui-même.

Au bout de quelques jours, je vois une première « annonce soumise à arbitrage » qui m’interpelle, il s’agit d’un poste de vendeur informatique qui nécessite une bonne connaissance des produits PC et une bonne capacité de conseil, je cherche un job depuis plus de 2 ans, je ne crache pas dans la soupe : même vendeur au SMIC (je gagnais 2800€ par mois dans ma vie d’avant), ça, c’est pile pour moi, à 10km de la maison, et en plus je serais heureux de le faire !

Je postule, forcément, mon Conseiller me connaissant bien, il transmettra ma candidature à l’entreprise, qui y verra une présélection à mon avantage

Bon. Ça, c’est ce que je croyais en toute honnêteté naïveté.

En vrai, comme dit l’autre, j’ai reçu une réponse automatique : « Motif : refusé. »

Sous le choc de l’incompréhension – n’allez pas dire que je suis facilement choqué non plus – j’interpelle par mail mon Conseiller Pôle-Emploi sur l’analyse qui a été faite trop rapidement selon moi et lui reproche avec courtoisie, exercice difficile, un manque absolu d’aide dans la réponse automatique, je pensais que c’était lui le décideur, on dirait bien que non, et que, franchement : refusé n’aidera jamais personne à comprendre quoi que ce soit.

Une réponse presque immédiate m’est retournée, par mon Conseiller cette fois, me laissant supposer que c’est bien lui qui a cliqué sur Non, me précisant que je « n’ai pas d’expérience en commerce et que l’employeur en demande 6 mois. »

Il ajoute d’un double ton mi-provocateur, mi-interrogateur : « Avez-vous cette compétence ? ».

Bon.

Alors voilà, pour résumer : ça fait deux ans que l’on parle de moi, de mon passé, que je présente à nouveau :

  • 6 années dans la promotion et la gestion immobilière
  • 18 années dans une ESN dont la première activité pour ses consultants en mission est de vendre des produits et des services (même ma représentativité syndicale a été en progression positive sur ma « carrière »)
  • 3 ans sur les marchés artisanaux comme passe-temps dominical d’une ancienne vie
  • Je n’évoque même plus les 6 années à faire des extras dans des bars – le soir en plus de l’immobilier – avant de reprendre mes études à 25 ans.

Il est censé me connaître au bout de 2 ans, avoir un dossier un peu épais, et identifier dans ces expériences professionnelles une quelconque capacité commerciale, non ? Sa réponse résonne encore pendant que je m’assure que j’ai bien des compétences de commerce tout en rassemblant ce qui reste de mon cerveau : « Motif : refusé. »

Passablement écœuré par cette incompétence ou mauvaise volonté à faire l’effort de réfléchir si une adéquation peut être faite, je réponds néanmoins toujours le plus courtoisement possible, mets à jour mon CV en ligne pour faire apparaître cette compétence manifestement honteuse qu’est le commerce en 25 ans de succession d’entreprises à but commercial, et l’en informe dans les 4 minutes qui suivent. Je ne pensais pas nécessaire de le faire transparaître à ce point, mais OK, encore une fois, je joue le jeu, et en temps réel, s’il vous plaît…

Je n’aurais néanmoins pas de réponse de mon Conseiller, ni manifestement de repêchage sur l’annonce en question…

Interlude entre 2 offres nécessitant arbitrage d’un conseiller

Dès le lendemain, peut-être vexé de n’avoir su identifier mon potentiel la veille, mon Conseiller a jugé utile de m’envoyer une proposition d’emploi émise par les magasins LIDL pour un poste de magasinier à 110km de chez moi (3 mois aux Arcs sur Argens).

Au prix de l’essence, un demi-salaire passerait uniquement dans le trajet. Mais j’apprendrai à transporter des palettes de yaourts !

Il a néanmoins cru bon d’ajouter que je n’avais pas d’obligation de postuler (sympa !), que je ne serais pas radié si par hasard je ne considérais pas cette proposition comme alléchante, ce qui constitue presque un aveu en soi : « J’en ai une ! J’en ai une ! Vous voyez que je pense à vous ! ».

Avec le recul, mon Conseiller n’est peut-être pour rien dans la décision spécifique de me proposer cette offre. Seule la chronologie « offre refusée – proposition idiote – offre refusée » sur 3 jours consécutifs me donne l’impression d’un redoutable cynisme. D’autant plus que cette proposition n’est que la 4ème (en 2 ans) émanant des services de Pôle-Emploi. Pile aujourd’hui !

Coïncidence troublante, mais peut-être automatisée… je le souhaite de tout cœur pour lui…

Néanmoins, et n’ayant rien contre le magasin LIDL qui se trouve à 400m de chez moi, auquel j’avais d’ailleurs postulé sans réponse ni rancune au début des recherches d’emploi RH que je citais tantôt, j’ai par contre un problème existentiel, soit à utiliser la moitié de mon revenu pour me rendre à mon travail, soit à constater que Pôle-Emploi n’a aucun demandeur à proximité du magasin LIDL qui se trouve à 110km de chez moi, et qui s’est installé justement à cet endroit-là, probablement, parce qu’il y a du monde (des clients ?) autour…

Le plein emploi, aux Arcs sur Argens ? Dont non-acte.

2ème offre nécessitant arbitrage d’un conseiller (refusée)

Le jour suivant, une seconde « offre soumise à arbitrage du Conseiller » a attisé ma curiosité, cette fois vers une fonction d’assistant en ressources humaines, dans le cadre d’un contrat de professionnalisation, ou d’une alternance via le diplôme que j’aimerais pourtant obtenir (licence en RH), « débutants acceptés », seul ‘hic’ dans mon CV : je n’ai pas de GEA mais une VAE me l’accorderait probablement.

Mais cette fois je SAIS que c’est bien mon Conseiller qui arbitre, celui-là même qui, imprégné par mes CV il y a 2 jours à peine, me connaît désormais sur le bout des doigts et peut, s’il le souhaite, m’aider à convaincre que le diplôme demandé n’est qu’une « exigence de culture minimale », fournie lors d’une formation dont j’ai acquis les connaissances au long de ma carrière, la pratique et la motivation en plus… Je me souviens même de l’offre RH qu’il m’a lui-même faite parvenir et qui demandait une ancienneté au poste que je n’avais pas !

Je postule donc, avec le petit commentaire à l’attention personnelle de mon Conseiller bien renseigné, pour lui rappeler que, dépourvu du diplôme GEA, j’ai néanmoins 6 années d’expérience en comptabilité et gestion d’une agence immobilière, ainsi que la création de nombreux logiciels de gestion/paye/compta qui font de moi un expert largement assimilable à une compétence GEA… même le Droit des Sociétés n’est pas un secret pour moi…

Je ne recevrai qu’une réponse tout aussi emprunte du grand esprit d’initiative que m’a démontré mon Conseiller pendant ma (désormais) carrière à Pôle-Emploi : « Motif : Vous n’avez pas le diplôme demandé. »

Instantanément j’ai visualisé le fonctionnement d’une bête requête SQL : … WHERE DIPLOME = ‘GEA’ … et la sentence robotique de sa réponse : Pas moi.

Sans réflexion. Sans recherche de compatibilité. Sans prise en compte de motivation.

Un robot. Pourquoi ?

Rapide retro-ingénierie du service « arbitrage du conseiller »

Étant désormais en possession de 2 notifications de refus, par réflexe professionnel je m’amuse à les comparer : le constat n’est pas surprenant, mais les réflexions qui découlent en vrac dans mon esprit sont inquiétantes.

En effet et sans surprise, si le mail semble personnalisé, l’ensemble du message est similaire d’un mail à l’autre, à l’exception de zones dynamiques (dont le contenu est personnalisable) noyées dans un message voulu humain. Entre autre le motif du refus, correspondant au mieux à un clic sur pas les compétences ou sur pas le diplôme exigé, au pire sur une adéquation SQL stricte décidée par une règle de gestion automatisée et proposée au Conseiller qui n’aura à effectuer qu’une simple validation sur OK.

Malencontreusement mal positionné, ce dernier message – pourtant important – ressemble à s’y méprendre aux petites lignes présentes dans la plupart des messages émis par les grandes sociétés : copyright et autres numéro de SIRET, liens de contacts… Il est trapu et n’est donc pas lu.

J’en déduis une liste matinale à consulter par le Conseiller : untel postule à ça, un autre tel postule là-bas, le tout présenté en mode « maître/détail », c’est-à-dire une liste des demandes d’arbitrage prenant une partie de l’écran – on dira par habitude : à gauche ou en haut, comme des « dossiers Outlook » – et le détail de l’individu sélectionné, présenté sur l’autre partie de l’écran.

Il s’agit donc chaque matin pour chaque Conseiller d’arbitrer par un « clic » assassin, entre le café et le résumé du match de foot d’hier soir, les choix parfois pleins d’espoir de leurs « clients ».

Je ne sais pas pourquoi, mais je mettrais ma main à couper que cette liste n’est pas bien longue chaque jour…

Avec un peu de chance (pour les demandeurs d’emploi) il y a la possibilité d’accéder aux demandes de l’employeur et à la liste de compétences décrites dans les CV du demandeur. Sans chance (toujours pour les demandeurs, bien sûr), le travail est prémâché par des règles de gestion strictes, par exemple : « SI diplôme-exigé ET pas-diplôme ALORS refusé », c’est simple, c’est fatal et sans appel. Le Conseiller n’aura qu’à cliquer sur un quelconque bouton de validation pour confirmer que la Machine a vu juste… le fameux pousse-bouton dont je visualisais déjà l’existence à la simple création de mon profil.

Le reste n’est pas déductible puisque je n’ai pas obtenu d’autre réponse-type.

Si la vie était bien faite, avant de se contenter de cliquer sur OK, le Conseiller devrait pouvoir se dire : « tiens il n’y a pas ceci mais cela pourrait bien compenser », et surtout, prendre le temps de se poser la question en essuyant sa tâche de café. Ainsi, pourquoi pas, pouvoir dégoter une perle rare pour son client recruteur, cette fois…

Finalement, ni le recruteur, ni le demandeur ne jouiront, chez Pôle-Emploi, de ce potentiel de Service…

Pour conclure cette brève analyse inversée, n’ayant pas ressenti, chez mon propre Conseiller, une quelconque approche synthétique quant à la mise en adéquation de mes cibles de postes et de mes réelles compétences et motivations, j’ai peur de devoir déduire que la solution « Pas de chance ! » a été le choix mis en place pour la liste matinale des espoirs perdus d’avance…

Pourquoi une validation par un être humain en la personne du Conseiller est-elle nécessaire si la décision n’est que mécanique ?

De la G(P)EC sur-mesure (pléonasme), fidèle à la case près : le vrai visage du marché du travail vu par Pôle-Emploi ? Bentham et Mills se seraient-ils trompés ?

Ici, pas question de mettre en adéquation hasardeuse une tomate et de la sauce tomate : on trouvera bien de la sauce tomate en boîte. On n’a qu’à renvoyer la tomate à LIDL…

À quoi ça sert, alors, tout ça ?

Les offres ne nécessitant pas arbitrage d’un conseiller

Heureusement, la grande majorité des offres du site de Pôle-Emploi ne sont pas soumises à l’irresponsable validation dictatoriale du Conseiller en Emploi, guidé par un HAL (l’ordinateur de 2001, l’odyssée de l’espace) de plus en plus déresponsabilisant.

Non, la plupart du temps, le recruteur donne ses coordonnées ou passe par des professionnels de l’intérim avec des coordonnées directes.

Ouf ! Parfois on comprend la volonté de certains de confronter Pôle-Emploi à la libre concurrence…

Et bizarrement, maintenant que je zone 10 à 15 fois par jour sur le site corporate à la recherche de l’emploi de ma vie, postulant, tous azimuts mais directement, à chaque poste pour lequel je me sens capable d’être efficace en l’état (plus motivation personnalisée), je constate que la plupart des annonces présentes sur Pôle-Emploi sont émises par les sites partenaires ou sont redondantes, annonces que j’ai déjà effeuillées ailleurs bien plus tôt dans la journée, voire… dans la semaine…

Réactif, Pôle-Emploi ?

Tout confondu, les annonces de Service à la Personne sont les plus nombreuses chaque jour, ces mêmes annonces que, bizarrement par contre, on ne trouve nulle part ailleurs…

Pôle-Emploi, grand pourvoyeur d’un certain service à la personne ?

À suivre…

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